Olivier est un artiste peintre vivant du côté de Marseille. Il est père de deux jeunes garçons et réussit plutôt bien sa vie professionnelle et familiale. Pourtant, le soir de sa nouvelle exposition resurgit l’image de son père à qui il ne parle plus depuis des années…

Chez les papas papous…

Il y a presque un an, Nathalie Meleumans, la dynamique éditrice des enfants rouges m’envoyait cet album. Je dois à la fois la remercier et m’excuser pour cette chronique qui a mis du temps à s’écrire. J’aurais aimé comprendre pourquoi mais je n’ai jamais réussi au cours de cette année à me consacrer pleinement à cet album. Alors, avec les copains de KBD, on a un peu forcé le destin. Écrire sur la père quand on l’est soi-même, est-ce vraiment si compliqué ? Il faut croire.

Cet album se situe dans la lignée d’un Little Star d’Andi Watson ou d’un Chaque Chose de Julien Neel. C’est une réflexion masculine intime, profonde et angoissée sur la notion de paternité. Durant 79 planches au rythme unique de 3 cases sur 4 (soit des gaufriers de 12 cases), Olivier Mariotti et son frère Guillaume à la couleur font part des doutes (de leurs doutes ?) d’Olivier, leur héros. Est-il le digne fils de son père ? Est-il condamné à marcher dans le pas paternel en reproduisant le positif comme le négatif ? Le sujet est ambitieux. Et le traitement ? Original.

Effet de ruptures

La composition des planches de Olivier Mariotti est sans doute ce que l’on fait de plus simple en BD. Je le répète, une planche de 12 cases, sans aucune dérogation. Cependant, il utilise souvent une technique « puzzle » lorsqu’il souhaite intégrer une grande image. Sur le coup, on peut se dire que le rythme risque d’être un peu ronronnant. Ce qui est parfois un peu le cas. Cependant, si la rupture ne se fait pas par le biais de la composition, elle s’exerce par le graphisme. En effet, le récit s’organise autour de flashbacks présent/passé – autrement dit Olivier le père/Olivier le fils – qui est marqué par une modification très forte de la technique de couleurs. Ainsi on passe d’une couleur très plate, presque informatique, à une couleur grasse, plus contrastée. L’idée de rupture dans le temps avait déjà utilisé par Julien Neel pour Chaque Chose mais ce dernier n’avait pas modifié l’aspect graphique, il avait joué beaucoup plus sur les effets « naturels » de transition pour rendre son histoire fluide. Dans le cas du Fils de son père, l’effet graphique est plutôt réussi mais la transition moins naturelle.

SOS super-papa

Cependant, cet aspect graphique est au service total de la narration. En effet, il suffit de voir les tableaux réalisés par Olivier et en particulier leurs couleurs, pour comprendre le lien présent entre le petit garçon et l’homme qu’il est devenu. Cette subtilité ouvre les portes à une interprétation des faits présentés tout au long de cet album. Car des explications sur l’éloignement du père du fils, vous n’en aurez pas car Olivier Mariotti ne cherche pas spécialement à expliquer mais cherche à suggérer, lance des pistes qui n’ont pas forcément d’aboutissement. Les pragmatiques, ceux qui refusent que les choses leur échappent supporteront sans doute assez mal cet album, car ici nous sommes dans le ressenti, dans l’écho du souvenir comme seul véritable règle, dans le « non je ne serais pas comme ça ». Surtout qu’Olivier, présent pour ses deux fils, aimé et amoureux de sa femme, prof de dessin et artiste accompli, a tout pour se rassurer. Mais entre nous, et je parle aux papas qui trainent sur ce blog au lieu de préparer les biberons, même si les pères font parfois semblant d’être des super-héros avec leurs enfants, ils n’ont pas toutes les réponses. Mais chut !

Même si au premier abord le personnage d’Olivier s’avère presque un peu trop parfait, les failles qui apparaissent au fur et à mesure de la lecture régulière (parfois un peu trop) de cet album laissent passer des questionnements parfois irrésolus sur la notion de paternité. Souvent dans un pur ressenti, à l’image de ces ruptures de couleurs entre passé et présent, la lecture de cet album agacera les réalistes pragmatiques. Les autres méditeront peut-être sur la célèbre phrase de Nietzche « Chaque homme cache en lui un enfant qui veut jouer ».

A découvrir : le site des frères Mariotti
A consulter : la fiche album sur le site des enfants rouges
A noter : cette chronique est une lecture KBD, retrouvez la synthèse le premier dimanche du mois de novembre.

scénario et dessins : Olivier Mariotti
couleurs : Guillaume Mariotti
Éditions : Les Enfants Rouges (2010) 17€

Public : Ado-adultes
Pour les bibliothécaires : une belle œuvre sur la paternité. Pas essentiel mais bien si vous cherches de bonnes BD de petits éditeurs.

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